Le réseau Brutus

Pierre Fourcaud, alors capitaine et au passé militaire prestigieux, créa dès Septembre 1940 à Marseille, un réseau de renseignement, arrêté peu après, son frère Boris, sous le pseudonyme de "Froment", le remplaça.

Fourcaud évadé, rencontra mi 1941 André Boyer qui en prit la direction, ainsi naquit le réseau Brutus (le nom avait été choisi par André Boyer, grand admirateur de Shakespeare, qui se souvenait de cette phrase, dans Jules César : "les vainqueurs ne peuvent faire que de lui BRUTUS des cendres, lui seul pensait loyalement à l'intérêt et au bien public"). Boyer avait pour adjoint Gaston Defferre, amis de longue date, associés dans leur profession d'avocat, avec Pierre Sudreau qui rejoignit très tôt le réseau, ils avaient décidé, dès 1940, de relever le défi de la défaite, et leur rencontre avec Pierre Fourcaud fut providentielle.

Il est à noter que dans le numéro spécial (N° 109-juin 1958) de la Revue de la France Libre consacré aux réseaux F.F.L. et comportant un article de présentation du colonel Passy figure cette mention : "Brutus" : Un de nos plus anciens et plus importants réseaux. Créé en septembre 1940 par Pierre Fourcaud […]

Le réseau Brutus transmet à Londres des renseignements aussi nombreux que précieux dès 1941 ayant mis en place un centre d'émission radio et créé plusieurs organisations clandestines. Le réseau s'étant développé très vite, rassembla des hommes d'origines politiques différentes, en majorité de gauche, avec des hommes qui ne se seraient pas serré la main avant la guerre : des jeunes "bourgeois" préparant l'inspection des Finances côtoyaient des syndicalistes et des ouvriers, des socialistes et des hommes engagés à droite se faisaient mutuellement confiance.
Le réseau Brutus, étendu sur l'ensemble du territoire, compta 1.124 agents catalogués et probablement plus de 1.200 firent partie du réseau. Le réseau paya un lourd tribut car 64 de ses membres furent tués et fusillés et que, parmi les 101 qui furent déportés, nombre d'entre eux ne revinrent pas.

Il faut souligner que, dès sa création, Brutus a symbolisé l'image de la Résistance, telle que la souhaitait le général de Gaulle : un rassemblement face à l'ennemi d'hommes et de femmes que tout séparait, très différent socialement et politiquement, créant ainsi un élément d'unanimité étonnant, d'autant plus remarquable que notre histoire n'en connut guère et fut un des tout premier exemple de ce que fut l'honneur de la Résistance.

La renommée de Brutus s'explique aussi dans la précocité de ses dirigeants, qui furent les premiers, dès 1941, à concevoir et à demander une organisation efficace de la Résistance, ainsi qu'en témoigne Daniel Cordier, secrétaire de Jean Moulin : "Devant le désordre grandissant qu'ils (les dirigeants de Brutus) observaient en zone libre, entre l'activité contradictoire des agents de la France Libre, des mouvements, des syndicats et des partis, ils avaient imaginé, dès juin 1941, le projet de faire avec un an d'avance une sorte de comité, de conseil de la Résistance (…) formé de représentants des mouvements, des partis et des syndicats, dont le but était d'unifier et de diriger l'action de la Résistance. Morandat, enthousiasmé par ce projet, l'envoya immédiatement à Londres, en réclamant son application d'urgence pour mettre fin à la pagaille grandissante".

André Boyer sera arrêté le 8 Décembre 1943, aussitôt remplacé par Gaston Defferre, il disparaîtra le 4 Avril 1945 après s'être évadé de la prison de Nordhausen.

 

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